Concert à la carte, c’est une longue didascalie de l’ordinaire, de la mécanique lénifiante du quotidien, d’une vie aliénée. La vie de Mademoiselle Rasch, seule dans son petit appartement après le travail qui n’offre que de quoi participer un peu à la société de consommation mais pas l’occasion de s’échapper vraiment. C’est la vie des jours qui se ressemblent tous et qui finit par un suicide.
Sauf que… sauf qu’il y a la mise en scène de Maya Bösch.
Parce que la confection solitaire d’un tapis au point noué, ce n’est peut-être pas aussi morne que cela en a l’air… Parce que même le fait de se préparer une tisane, peut devenir un acte avec plus de sensualité que prévu… on peut y mettre ce que l’on veut! Parce qu’être une femme seule, ce n’est pas être une vielle fille sans désir… Les deux comédiennes débarquent, sans y être vraiment invitées, dans la vie de cette Mademoiselle Rasch. Elles regardent sa vie par-dessus son épaule et lui soufflent que peut-être ce n’est pas la peine de faire tout cela avec autant de sérieux.
En tant que spectatrice, c’est à la fois cette radiographie d’une vie aliénée, pas si éloignée de la mienne, qui m’a écrasée dans mon fauteuil mais aussi quelque chose de foutraque qui s’insinue, qui donne un autre ton, un autre signal. Celui de ne pas rester figée, de ne pas forcément laver ses bas le soir pour que tout soit propre en ordre, de prendre du plaisir là où il n’est pas. Et puis même si un coup de blues nous a fait avoir la main lourde sur les somnifères, qui dit que la coupe de Prosecco qui s’en suit soit forcément suicidaire? Peut-être juste que tout d’un coup on s’est dit que les bulles pouvaient mettre du pétillant dans la vie, et tant pis pour le mal de tête du lendemain.
Je ne sais pas si un autre monde est possible, mais au moins une version juste un peu différente qui ne renonce pas systématiquement, qui ne s’enferme pas. Une version dans laquelle on sort, dans laquelle on va au théâtre plutôt que ranger encore une fois son petit chez soi.
Par Alexandra T., comité de spectatrices